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Trois ans après LKI, Ali Gourgane fils de harki, est toujours en colère

A cinquante-cinq ans, Ali Gourgane se désespère de retrouver un emploi.

 

Il a été le représentant des 63 salariés de LKI, licenciés à la fin de 2013. Il revient sur son combat mené en vain, et la difficulté qu’il connaît à retrouver un emploi

 

Il arbore maintenant une petite barbe, blanche et impeccablement taillée. C’est bien le seul changement qu’on trouve à Ali Gourgane. Près de trois ans après la liquidation de LKI, sa colère et ses soupçons sont les mêmes, avec un brin de résignation.

Avec le soutien de ses collègues en grève, il a saisi la justice prud’homale, en vain. La liquidation judiciaire a déclenché les licenciements des 63 employés. Fin de l’histoire. « La justice, elle est où ? »s’indigne Ali Gourgane.

L’ex-représentant des LKI est convaincu que son ancien patron a récréé la même activité dans le Dunkerquois. Mais il ne peut pas le prouver. Il en est seulement convaincu. Tout comme il s’étonne de voir un Lidl se construire sur l’ancien site de LKI, et a voulu y voir encore un lien avec son ancien patron.

Mais la société était seulement locataire. L’ancien délégué est bien obligé de s’en tenir là, avec son amertume. Il n’a plus renouvelé son adhésion à Force Ouvrière. Il n’a pas retrouvé d’emploi durable non plus.

Reçu, puis déçu

En trois ans, Ali Gourgane n’a eu d’emploi que durant un mois, en tant que contrôleur dimensionnel en intérim, dans une entreprise outreloise : « Ils allaient créer des postes mais, manque de pot, ils ont eu une baisse d’activité. » L’ex-LKI est connu dans toutes les boîtes d’intérim. 

Avec parfois des événements troublants. Ali Gourgane montre la réponse d’une entreprise industrielle calaisienne à sa candidature spontanée, datée d’août 2015.

Le mail est encourageant, lui explique que l’entreprise embauche des intérimaires car elle connaît un surcroît d’activité, et le renvoie vers la boîte d’intérim associée : « Mais la boîte d’intérim ne m’a jamais rappelé pour travailler ! », se désole Ali Gourgane« Qu’est-ce qui se passe ? C’est parce que j’ai 55 ans ? C’est parce que je suis arabe ? Ou c’est parce qu’on m’a vu dans le journal pendant un mois au moment de LKI ? Mais, je n’ai rien fait de mal : j’ai défendu les emplois ! » Toutes ses réflexions le ramènent à son combat perdu pour LKI : «À l’époque, on me déroulait le tapis rouge.

Tous les élus m’ont reçu. Le sous-préfet m’a reçu. » Non pas qu’il en garde un mauvais souvenir : « On a été écoutés. Mais il n’y a rien eu derrière… »

Malgré deux statuts prioritaires

Le dossier LKI est clos par la force des choses, mais Ali Gourgane a d’autres motifs de révolte. Pour deux raisons, la loi est de son côté pour l’aider à retrouver un travail. Il est reconnu travailleur handicapé, pour des problèmes de dos.

Il est aussi fils de harki. Ces deux conditions rendent sa candidature prioritaire dans les trois fonctions publiques.

En théorie, selon la loi relative au Plan harkis, Ali Gourgane est prioritaire sur un emploi d’adjoint technique, auquel il peut accéder sans concours. Comme des cartes, Ali Gourgane abat les lettres de réponses négatives de toutes les communes du Calaisis, et de l’intercommunalité.

Aucune de ces collectivités n’a été en mesure de lui donner un emploi, en dépit de ses deux statuts prioritaires. « Je sais bien que le boulot ne court pas les rues, mais il y a de quoi péter les plombs, je te jure ! » peste Ali Gourgane en tournant et retournant les courriers, « je suis ouvrier qualifié P.3, mais même un boulot au SMIC, je prends. » Outre ses trois CAP de monteur fraiseur-ajusteur-tourneur, et son BEP de mécanicien-monteur, Ali Gourgane est aussi titulaire du permis D (transport en commun), mais sa candidature n’a pas été retenue par Calais Opale Bus.

Dans son désespoir, il a écrit au préfet, plusieurs fois, au député et même au premier ministre. Peine perdue, évidemment, ce dernier a répondu qu’il ne pouvait intervenir dans le recrutement des administrations. En février de l’année prochaine, Ali Gourgane, comme tant d’autres, perdra ses droits aux Assedic : « Et là, je ne sais pas comment je vais faire… »

L’ex-P-DG de LKI n’est plus joignable.

Grégory FAUCQUEZ 

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