1 Avril 2024
Les harkis étaient à l'honneur ce samedi 30 mars 2024 à Is-sur-Tille (Côte-d'Or). Malgré la pluie, une cérémonie d'hommage à cette communauté s'est tenue en présence notamment de l'un d'eux, Hamida Benredjem. Un moment fort et symbolique vécu avec émotions.
Hamida Benredjem, l'un des harkis d'Is-sur-Tille, était porte-drapeau pendant la cérémonie. © Radio France - Dimitri Morgado
La commune d'Is-sur-Tille (Côte-d'Or) a rendu hommage aux harkis ce samedi 30 mars 2024. Les harkis, ce sont ces Français d'origine algérienne qui ont combattu aux côtés de la France pendant la guerre d'Algérie. Après la fin du conflit, ils ont été poursuivis par l'armée algérienne. Une partie d'entre eux ont trouvé refuge en France, notamment en Côte-d'Or.
En 1964, 25 familles se sont installées dans des « hameaux de forestage » en Côte-d'Or. Des endroits situés à Vanvey-sur-Ource, Baigneux-les-Juifs, mais aussi Is-sur-Tille. Lors de cet hommage, le maire a dévoilé un panneau, où l'on peut lire " Chemin des harkis, soldats de France ". Il s'agit du nouveau nom d'un sentier situé tout proche de l'ancien camp. Parmi ceux qui ont assisté à cette cérémonie, Hamida Benredjem, l'un des harkis de la commune, très ému.
Des conditions de vie difficiles
Uniforme sur les épaules et couvre-chef où on peut lire le mot " harkis ". Hamida a aujourd'hui 79 ans. Son arrivée à Is-sur-Tille, il s'en rappelle très bien. " On était très contents quand on est arrivés, se remémore-t-il. C'était l'Amérique pour nous ! " Parce qu'en 1964, Hamida et les autres familles trouvent ici des maisons préfabriquées, un vrai confort, puisqu'ils venaient tous du camp de Rivesaltes, près de Perpignan, où la vie était encore plus difficile. " Pas de WC, pas d'eau, il fallait aller dehors, et pas de chauffage, décrit Hamida. Quand le mistral soufflait, il fallait bien attacher la toile de tente. Là, c'était la misère. "
La vie à Is-sur-Tille n'est quand même pas de tout repos ces années-là. Les hommes vont travailler par tous les temps dans les forêts. On leur doit d'ailleurs l'aménagement de 21 000 hectares de forêt en Côte-d'Or. " Il pleuvait, on était là-bas. Il y avait de la neige en 1963-1964, vraiment de la neige, se rappelle l'homme. On faisait le boulot qu'il fallait faire. On mangeait sur place parce qu'on partait le matin, et on rentrait le soir. " En 1967, Hamida trouve un travail au CEA de Valduc où il fera toute sa carrière. Il achète ensuite une maison de trois pièces avec son frère et ses parents après la fermeture définitive du camp en 1971.
Hamida Benredjem habite toujours aujourd'hui à Is-sur-Tille. © Radio France - Dimitri Morgado
Des bonheurs simples
Les hommes travaillaient tous les jours de la semaine, sauf le samedi après-midi. Ils en profitaient pour se retrouver dans un café de la ville, l'un des seuls endroits où ils se sentaient pleinement acceptés. Il s'agissait d'un bistrot sur la place Jean Durand, tenu par madame Triboulet. " Elle nous accueillait, on discutait, les gens parlaient un peu du pays, c'est normal. Ils jouaient aux dominos, se souvient Hamida. C'était important, il y avait des harkis de Vesoul et de Langres, et tout le monde se retrouvait. C'était des moments de bonheur, passer un petit moment le samedi après-midi, c'était vraiment convivial. "
Le "Chemin des harkis" mène symboliquement directement dans la forêt. © Radio France - Dimitri Morgado
Maintenir le souvenir
Cette cérémonie d'hommage à Is-sur-Tille permet de continuer à parler de ces histoires de vie. Un moment important aussi pour les familles des harkis. Rémy Benredjem est le neveu d'Hamida. Il est aussi le secrétaire et porte-parole de l'association des Anciens Harkis de Côte-d'Or. Il est lui-même fils de harki. " Je suis très ému parce qu'on le fait aujourd'hui pour nous, notre mémoire. On fait notre propre histoire de nos familles, de notre intégration en France, parce que c'est important, raconte-t-il. Mais c'est aussi pour nos parents. J'ai la chance d'avoir encore mon père et mon oncle. Faire ça de leur vivant, je pense que c'est important pour eux aussi. "
Ses parents ont connu l'exil dans la douleur, mais aussi la difficulté de devoir assumer ce statut de harkis aux yeux des autres. " La guerre les a entraînés là-dedans. Les gens sont victimes des guerres et donc ils se sont retrouvés à devoir fuir pour leur sécurité, explique Rémy. Malgré tout ce qu'il leur est arrivé, aux harkis, ils ont une force de résilience et leurs familles, leurs enfants aujourd'hui se sont construits en France, et ce, malgré toutes les difficultés qu'ils ont connues.
Un chêne a été planté en l'honneur de l'implication des harkis dans nos forêts de Côte-d'Or. © Radio France - Dimitri Morgado
30/03/2024
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