25 Juillet 2015
Ce livre est écrit par un professeur de lettres qui a fait son service militaire en tant que sous-lieutenant de réserve en Algérie en 1958 et 1959 au 5ème BCP dans la région de Matimprey en Oranie. Il a été ensuite officier-adjoint d’une SAS. Chrétien progressiste, responsable de la JEC, il a été tenté par l’objection de conscience. Lecteur de Sartre et de la revue de gauche La Quinzaine, à son arrivée dans le pays il découvre un monde qui n’était pas celui qu’on lui avait décrit et devient bientôt un camusien convaincu.
Son récit mêle souvenirs et réflexions, raconte très rapidement l’histoire de la France en Algérie et parle de la guerre d’Algérie qui n’était pas pour l’armée la mission de pacification qu’on lui avait annoncée mais une guerre.
L’auteur note que l’ALN n’a jamais eu un nombre important de combattants dans les maquis (« au maximum 25000 Fellaghas ») mais utilisera des terroristes dont la mission était de terroriser les populations civiles et utilisait pour cela tous les moyens même ceux que les lois de la guerre bannissent. Il accuse les « ennemis de l’ombre »(les porteurs de valises) d’Algérie, de France, de l’étranger, qui récoltaient et transportaient les fonds, les armes et protégeaient fellaghas et terroristes d’avoir répandu « le bruit que la France avait envahi l’Algérie pour faire la guerre aux Arabes et les soumettre au seul profit des colons ». Il note qu’ils ont imposé l’idée que les militaires français étaient de 1954 à 1962 comme les Allemands et les Fellaghas comme les résistants dans la France de l’Occupation de 1940 à 1944 et souligne que lors de son passage à Coëtquidan il était inculqué aux EOR que la violence était non seulement inutile mais néfaste et dégradante pour ceux qui la pratiqueraient.
Il rappelle que l’Algérie n’existe en fait que depuis 1839 quand son nom lui a été donné par un ministre français, que les pieds-noirs n’étaient pas des colons : il n’y avait que 20000 agriculteurs dont 8000 exploitaient moins de 10 ha. 95,5% des Européens (d’origine espagnole, italienne, maltaise, française…) étaient ouvriers, commerçants, professions libérales, fonctionnaires et qu’à qualification égale les pieds-noirs et les musulmans avaient les mêmes salaires et les mêmes avantages sociaux.
Le littéraire se plait à souligner l’étymologie du mot colonisation qui vient du latin colere qui signifie « cultiver un lopin de terre » alors que le colonialisme est un terme politique qui définit l’exploitation d’une terre étrangère et des autochtones au seul profit de la nation colonisatrice. Et de montrer du doigt le glissement sémantique habile opéré par les « lobbies politico-philosophiques » entre colonisation et colonialisme. Il va plus loin en interrogeant :
la France a-t-elle comme aux Etats-Unis, chassé les indigènes pour les parquer dans des réserves ?
La France a-t-elle comme le font les Israéliens chassé les autochtones pour occuper leurs terres et y construire des villages ?
Avons-nous comme en Afrique du Sud pratiqué la ségrégation ?
Il évoque bien d’autres sujets : la scolarisation dans l’Algérie Française avec les difficultés aux jeunes filles musulmanes d’y accéder, les destructions des écoles par les « fellaghas », les instituteurs du bled menacés… L’islam a fait que l’on désignait les Algériens par leur religion : c’étaient des Français-Musulmans ce qui souligne le rôle important de cette religion dans la société en Algérie au temps de la France. Il parle encore de la duplicité de De Gaulle…
Mais tous ces thèmes ont déjà été traités cent fois par d’autres ; il faut surtout s’attarder sur quelques aspects moins évoqués tel celui qui a trait à l’Algérie, enjeu de la guerre froide.
Pour Claude Rioland, après la seconde guerre mondiale les USA et l’URSS avaient l’ambition de se partager le monde, l’URSS politiquement en imposant l’idéologie marxiste et les USA, économiquement, en exportant le modèle capitaliste.
Pour les Etats-Unis le but était de « libérer les peuples soumis au joug colonial » et de les attirer dans leur sphère d’influence. C’est ainsi qu’en 1957, en plein conflit algérien, le sénateur John Kennedy, futur président, dénonce la présence coloniale française en Algérie et appelle à l’indépendance de ce pays.
Il est évident que pour Kennedy, le but est d’aboutir à un Maghreb uni comprenant la Lybie pour permettre l’expansion économique américanophile et lutter contre le communisme.
Les mauvaises relations de De Gaulle avec le monde anglo-américain l’amenèrent à tenter d’utiliser l’influence de l’URSS pour limiter l’influence anglo-saxonne. Mais l’influence américaine finira par s’imposer.
Enfin, l’analyse de l’abandon de l’Algérie par la France est un constat sans nuance qui puise ses sources aux réalités de l’année 1962.
Roger Vetillard, juin 2015.
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