27 Décembre 2015
Pétanque et Guerre d’Algérie ?
La salle Adrienne Horvath de l'espace La Fare-Alais s'est dotée dernièrement d'un terrain de pétanque à l'occasion de la représentation théâtrale "Les pieds tanqués" proposée par la compagnie Artscenicum dans le cadre des Atypiques.
Devant une salle comble, les quatre acteurs ont échangé autour
d'une partie de pétanque sur les problèmes les plus complexes de la mémoire de l'Algérie tels que les harkis et l'engagement de certains Français en faveur de l'Algérie tandis que
Jean-Louis Todisco
l'accordéoniste ménageait des pauses dans la discussion.
Ce travail de mémoire a été apprécié par le public et s'est achevé par le verre de l'amitié avec des conversations autour de la guerre d'Algérie.
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4 personnages, joueurs de pétanque, seront en scène dans cette partie de boules de tous les dangers :
Un Français provençal de « souche » – Loule
Un Francilien fraîchement arrivé en Provence – M. Blanc
Un Français d’origine algérienne – Yaya
Un Français rapatrié d’Algérie – Zé
Le terme pétanque vient des mots de l’occitan provençal pè « pied » et tanca «pieu», donnant en français régional l’expression « jouer à pétanque » ou encore à « pés tanqués », c’est-à-dire avec les pieds joints et ancrés dans le sol, par opposition au jeu provençal où le joueur peut faire des pas et prendre de l’élan.
Ce jeu, dont la règle impose d’être silencieux pour ne pas déconcentrer l’adversaire, est paradoxalement un lieu de la parole : une parole d’initié avec son vocabulaire propre, au second degré quand on est dans le Sud,parfois moqueur ou plus sérieux pour celui qui se prend au jeu. L’échange est en effet quasi permanent, dans le geste ou dans les silences qui en disent long, mais surtout dans le verbe.
Yvan Audouard, grand conteur du Sud a dit du jeu de boules qu’il était à la Provence ce que le théâtre de Delphes était la Grèce antique, un lieu de Tragédie. Il terminait cependant en disant qu’à la fin d’une partie tout le monde meurt … de rire ! Au théâtre, on se relève aussi après la mort et on en rit. Car c’est aussi la fonction du théâtre : rire de la mort parce que ça nous tient en vie.
Dans ce spectacle l’image du pied « tanqué » (au delà de la règle qui définit ce jeu) signifie celle du pied enraciné; le jeu lui-même, les rapports humains qui sont l’œuvre dans une population de déraciné ou d’enraciné et le terrain , le territoire dans lequel les protagonistes se retrouvent et s’enracinent.
Un jeu donc pour évoquer les problématiques d’appartenance à un territoire, de déracinement et d’enracinement, d’identité. Une partie de boules avec ses bons mots, ses galéjades, mais aussi ses coups bas, pour évoquer les blessures de l’exil, de la culpabilité, des rancœurs mais aussi des pardons.
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