27 Janvier 2022
La sénatrice reconnaît le bien-fondé du projet de loi d'indemnisation, tout en regrettant qu'il n'aille pas " jusqu’au bout de ce que nous impose la vérité".
Le projet de loi de reconnaissance et de réparation des préjudices subies par les harkis, pendant et après la Guerre d'Algérie, après avoir été adopté par l'Assemblée nationale est désormais étudié par les sénateurs. Ce texte prévoit notamment une indemnisation des dizaines de milliers de familles qui furent accueillies (souvent dans des conditions indignes) en France.
Le Lot-et-Garonne est lié à cette douloureuse histoire, et ce mardi la sénatrice LR Christine Bonfanti-Dossat est montée à la tribune du Sénat, eut égard à l'importante et à la symbolique de ce texte pour de nombreux habitants du département.
Ne rien oublier
" Comment ne pas penser, en cet instant, à ces hommes et à ces femmes qui nous écoutent, attendent et espèrent ? Ils n'ont rien oublié de ces heures où l'indépendance de l'Algérie a fait, en un instant, basculer plus d'un siècle d'histoire. Dans ces moments troubles où aucun manichéisme ne doit advenir, où aucun oubli ne doit également entacher la mémoire officielle et collective, je crois qu’il faut parler de la responsabilité de la France dans ce qui fut un drame français. Ne rien oublier, c’est se souvenir que les Harkis ont toujours cru en la France, au sens du devoir envers elle dans les crises et les guerres. Ne rien oublier, c’est rappeler le courage qu’il fallut dans ce choix fait par les Harkis au moment de l’indépendance de l’Algérie : le choix de la France. Ne rien oublier, surtout, c’est connaître et prendre conscience des conditions difficiles et dramatiques de l’arrivée d'un million de femmes, d'enfants et d'hommes, contraints à un exil forcé, douloureux et sans retour. Car, bien loin d’être un « accueil » heureux sur le sol métropolitain, il s’est agi malheureusement avant tout d’un « exil » long et triste de la terre d’Algérie", a-t-elle déclaré.
Le camp de Bias
" Comme parlementaire élue du Lot-et-Garonne, au cœur duquel se trouve le camp de Bias, je peux aisément vous dire combien ces lieux d’infortune furent précaires, honteux et misérables. (...) Aujourd'hui il s’agit pour la France d'une question d'honneur : réparons, malgré le temps passé, les erreurs qui ont été commises car pendant très longtemps, les Harkis n'ont pas bénéficié d’une politique publique à la hauteur des enjeux, notamment celle de leur insertion au sein de notre société métropolitaine. N’oublions pas tout de même que la France a tout de même mis en place des régimes d'indemnisation, elle a aidé les veuves des anciens combattants, elle a contribué à l’essor professionnel des enfants de Harkis. Mais, tant dans la force du symbole que dans le réalisme de la juste rétribution financière, le compte n’y est pas et la République ne peut se satisfaire de cela."
Faire œuvre de réparation
" Je considère que cette loi a le mérite d’exister : elle constitue une pierre importante dans cette œuvre de réparation. Je regrette toutefois que ce texte ne s’adresse pas à toutes les victimes, celles des « camps », comme à Bias, ou dans les hameaux de forestage, mais celles arrivées ici, sur le sol métropolitain, par leurs propres moyens ! C’était d’ailleurs le sens d’un des amendements que j’ai déposés. Il ne faut pas créer une injustice pour en réparer une autre. (...) Le président de la République a demandé pardon aux combattants abandonnés. Mais que signifie cette demande de pardon si elle n’est pas capable d’aller jusqu’au bout de ce que nous impose la vérité ? C’est pourquoi, à la lumière de la remise en contexte historique et culturelle, les problématiques de temporalité et de résultat final de ce texte me laissent quelque peu perplexe. Temporalité, d’une part, car j’estime qu’il est bien tard pour porter un intérêt réel, sincère et dénué de tout électoralisme dans le crépuscule du quinquennat présidentiel et à l’aube d’une campagne enfin « officielle ». Un tel projet de loi doit se construire en amont, avec sérieux et approfondissement, pour ne rien oublier, c’est-à-dire en début de législature. Résultat final, d’autre part, car les nombreuses auditions menées ici, au Sénat, tout comme les discussions passionnées et passionnantes que j’ai eues et que j’ai toujours en Lot-et-Garonne, avec les Harkis, nous imposent un devoir à poursuivre."
26/01/2022
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