2 Avril 2018
Algérie-France, la voix des objets
Tarif Entrée libre, Lieu Forum. à 18 h 30 |
Table ronde, installation et musique
Avec : Éric Savarese (docteur en sciences politiques) et Zahia Rahmani (historienne d’art et commissaire d’exposition)
Modération : Florence Hudowicz (conservatrice), Tewfik Hakem (journaliste, producteur à France Culture)
Préambule musical : Ensemble de musique et chants berbères avec Malik Ziad (mandole, guitare, chant), Mheni Benlala (basse, chant) et Hassan Boukerou (percussions, chant)
Les divisions au sein de la société coloniale algérienne finissent par provoquer la guerre et l’exil en France d’une partie notable de la population. Dans cette émigration d’une ampleur inattendue se trouvent une partie des « Français musulmans » (et leurs familles) qui se sont enrôlés pendant la guerre aux côtés de la France.
Ces « supplétifs », mieux connus sous le terme de « harkis », purent gagner la métropole malgré l’interdiction des dispositions officielles.
Très vite, ils ne furent pas simplement qualifiés de « rapatriés » mais de « Français Musulmans Réfugiés » (FMR) ou « Français Rapatriés d’Origine Nord-Africaine » (RONA ou FRONA)… Cette distinction s’inscrivait dans le prolongement des pratiques politiques et administratives du temps colonial algérien qui, jusqu’en 1958, ont séparé la population en deux groupes juridiques.
Elle se traduit par des mesures contraignantes : limitation de la liberté d’aller et venir, affectation durable dans des camps de transit ou des hameaux de forestage, encadrement militaire… Les mesures compensatoires globales sont très tardives (fin des années 1980), et c’est seulement en 2005 qu’une loi reconnaît « les souffrances éprouvées et les sacrifices endurés ».
Les harkis ont connu pendant cinquante ans un régime spécial, comme s’ils n’étaient ni totalement rapatriés, ni totalement français, tandis que l’Algérie les maintient encore à l’écart. Dans cette altérité multiple, les familles concernées ont dû reconstruire une manière de vivre et d’exister, forgeant leur histoire dans la transmission des mémoires intimes, qu’il reste à inscrire dans l’histoire collective.
Dans la vitrine du forum, lettres, photographies et affiches évoquent le temps de la guerre en Algérie, tandis que quelques objets ethnographiques et des témoignages plus récents attestent de pratiques traditionnelles maintenues d’une génération à l’autre par les Français musulmans rapatriés en métropole.
Eric Savarese
Eric Savarese est professeur de science politique à l’Université de Montpellier. Ses principaux travaux portent sur la citoyenneté envisagée dans le contexte colonial et postcolonial à travers notamment la légitimation de la colonisation, les pieds-noirs et rapatriés, les consultations électorales dans l’Algérie coloniale, les politiques de la mémoire et les transformations de la vie politique française dans le cadre de la « rencontre postcoloniale ».
Il travaille également sur l’analyse iconographique du politique et les questions liées à l’épistémologie des sciences sociales.
Zahia Rahmani
Écrivain et historienne d'art de formation, Zahia Rahmani est responsable à l’INHA du domaine de recherche Arts et architecture dans la mondialisation, récemment renommé Histoire de l'art mondialisée.
Elle est l’auteur d’une trilogie consacrée à des figures contemporaines « d’hommes bannis ». Un travail littéraire sur des figures de la théorie postcoloniale : Moze (2003), Musulman roman (2005) et France récit d'une enfance (2006), aux éditions Sabine Wespieser. Elle a notamment publié « Le Harki comme spectre ou l’Écriture du déterrement », in Retours du colonial ? Disculpation et réhabilitation de l’histoire coloniale (2008, édition. Atalante) et « Le Moderne comme point d'arrivée sans fin », in Qu'est-ce que le contemporain (2010, éd. Cécile Defaut).
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