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Madame H, fille de harki

Madame H est née le 14 mars 1959 à Bouira (Kabylie) ; elle est la troisième enfant d’une famille nombreuse.

Son père a connu une enfance difficile : orphelin très jeune, sa famille a été victime de spoliation de la part des Français ; analphabète, il a travaillé très tôt pour survivre puis pour subvenir aux besoins de  sa famille.

Il  effectuait alors divers petits métiers : il a été tour à tour cireur de chaussures et garçon de café ; il a aussi  travaillé dans une boucherie et dans un moulin. Sa mère, bergère dans un premier temps, devient par la suite mère au foyer pour s’occuper de ses enfants.

En 1955,  le père de madame H intègre une harka et devient éclaireur au service de l’armée française (à Bou Saâda puis à Djelfa).

Les raisons de ce « ralliement » sont multiples. Son père subit dans un premier temps des pressions de l’armée française : il est mis en prison et  promené en tenue militaire dans son village.

Il apparaît alors comme un traitre aux yeux de la population et n’a plus vraiment le choix. C’est aussi la misère qui le pousse à s’engager sous l’uniforme français ; enfin, sa dernière motivation est  familiale : il rejoint un frère déjà harki. Il est témoin d’atrocités de la part de l’armée française et des combattants nationalistes. Durant cette époque la famille de Madame H est logée dans un camp militaire ; les épouses des harkis servaient alors de personnels.

Madame H, fille de harki

Lors de l’indépendance, le père de madame H, considéré désormais comme un traitre de la part des autorités algériennes,  se cache à Bouira tandis que la famille s’installe Aïn Bessen ; elle se souvient des jets de pierres sur sa maison la nuit mais l’évènement le plus dramatique de cette période reste le décès de son frère le 09 septembre 1963 lors de règlement de compte contre les harkis.

Totalement abandonnée par l’armée française, la famille quitte finalement l’Algérie grâce à l’aide d’un ami de la famille. Ils se rendent d’abord à Alger puis transite par Marseille pour finalement rejoindre des connaissances dans la la région stéphanoise.

Plusieurs familles de harkis s’installent alors dans la vallée de l’Ondaine (dans le quartier de la Romière  au Chambon Feugerolles,  à Firminy-Vert ou encore à Sampicot à Unieux). 

Toute la famille loge dans une seule pièce dans le quartier du Mas à Firminy ;  six mois plus tard,  elle déménage au Chambon Feugerolles dans un quartier où vivaient alors des Nord Africains, des Portugais ainsi que des Français.

Madame H se souvient du racisme dont elle était victime de la part de certains Français mais aussi de la part de certains Algériens.  Elle se rappelle également du soutien matériel et moral que les sœurs de Saint Vincent de Paul ont apporté à sa famille.

Aujourd’hui, Madame H vit toujours au Chambon Feugerolles ; elle garde de cette  enfance difficile un traumatisme profond.

Publié par Louis BRUN

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