30 Avril 2016
Abdallah et Messaoud ont déposé plainte./Photo DDM, Florent Raoul.
Depuis plusieurs semaines, les harkis campent devant la préfecture pour «faire valoir leurs droits». Une habitante excédée aurait complètement dérapé lundi.
Les harkis sont en colère. Rien de neuf sous le soleil diront certains après des semaines de campement au square de l'Arget. Et c'est loin d'être fini. Leur combat pour faire appliquer la loi de 2010 sur les emplois réservés aux enfants de harkis (au même titre que les pensionnés de guerre civils, militaires et les personnes assimilées, leur conjoint survivant, leurs orphelins et leurs enfants ainsi que les militaires en activité ou libérés depuis moins de trois ans) se poursuit. Mais pas forcément sur le front que l'on attendait.
Un acte isolé
Lundi, deux des membres du campement ont expliqué avoir essuyé des insultes racistes de la part d'une mère de famille révoltée par leur présence. «On buvait le café vers 17 h 30 lorsqu'une dame d'environ 30 ans, avec son petit garçon, nous a interpellés de manière agressive pour nous demander quand est-ce qu'on dégagerait, raconte Abdallah. On a essayé de dialoguer, de ne pas rentrer dans son jeu et de lui expliquer que le parc restait accessible. Des enfants jouaient d'ailleurs à ce moment-là... Mais elle a fini par nous arracher la banderole, nous insulter de sales Arabes et de bougnoules avant de faire le salut nazi à plusieurs reprises.»
«Très rapidement», deux agents des renseignements territoriaux, puis des policiers, étaient sur place. Après un contrôle d'identité et un rappel à l'ordre, la dame est rentrée chez elle, non loin de là. «Je suis chez moi plus que vous ! Vous êtes indignes du drapeau français !», aurait-elle proféré. «Elle a touché à notre dignité», souffle Abdallah.
L'affaire n'est pas anodine même si elle «n'illustre en rien l'état d'esprit de la population fuxéenne», rappelle Ronan Boilot, le sous-préfet qui a été informé de l'incident. «Je souhaite être vigilant sur toute insulte à caractère racial. Si ces propos sont avérés, une plainte doit être déposée. Ça me paraît cohérent vu l'émotion et la nature des insultes. Mais sur le fond, ça reste un micro-événement d'une personne exaspérée même si ce n'est absolument pas excusable ni acceptable.»
Avec Messaoud, Abdallah a bien déposé plainte. La procédure est en cours. Pour rappel, une personne proférant une insulte raciste peut être punie jusqu'à 6 mois de prison et 22 500 € d'amende. S'il s'agit d'une diffamation (qui porte atteinte à l'honneur) publique, c'est jusqu'à un an de prison et/ou 45 000 € d'amende.
« Une démarche politique »
Les harkis d'Ariège ont envoyé des courriers recommandés au plus haut niveau de l'État. La préfète, Marie Lajus, a également informé le secrétaire d'État des anciens combattants et le ministère de l'Intérieur de leurs revendications. «Leur démarche est une démarche politique au sens noble du terme : ces gens souffrent, note Ronan Boillot. Mais il faut comprendre que cette loi préconise, et non oblige. D'autant qu'il n'y a aucune territorialisation ni de quota dans le processus de recrutement : il s'agit de concours dans la Fonction publique. C'est donc une problématique de mise en œuvre d'un dispositif légal qui est nationale. Des enfants de harkis travaillent déjà dans les services publics en Ariège mais pas dans ce cadre des emplois réservés. C'est à la Fédération et au secrétariat d'État des anciens combattants de travailler dessus.»
30/04/2016
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