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Gard : les enfants de harkis du camp de St-Maurice-l’Ardoise réclament justice

Saint-Maurice-l’Ardoise (Gard), mercredi. Devant l’entrée de l’ancien camp de harkis, par lequel ils ont transité à leur arrivée en France (de gauche à droite) : Rachid Guemrirene, Hacène Arfi et Slimane Rezig. LP/Alexandre Seba

Rapatriés en France et rassemblés dans des camps après la guerre d’Algérie, les enfants de harkis vont saisir la justice sur leurs conditions de vie alors.

« Le Conseil d’État m’a mis une claque ! » Le 3 octobre dernier, la haute juridiction ordonne l’indemnisation d’un fils de harki. Et juge ainsi l’État français responsable des « conditions de vie indignes réservées aux familles de harkis dans les camps où elles ont été accueillies, en France, après l’indépendance de l’Algérie ». Depuis, Hacène Arfi, président de la coordination harka dans le Gard, s’est remis de cette « claque » pour abattre, toujours de son propre aveu, « un travail d’enfer ».

Auprès d’historiens, archivistes et témoins, il rassemble toute information liée au camp de Saint-Maurice-l’Ardoise, où ont transité près de 10 000 harkis entre 1962 et 1976. Longtemps ignorés par l’histoire, ces supplétifs musulmans de l’armée française ont été abandonnés puis massacrés en Algérie après l’indépendance, quand ils n’ont pas été rapatriés en métropole (pour environ 43 000 d’entre eux) dans des camps de transit.

Aujourd’hui, Hacène Arfi compte faire reconnaître à l’État le préjudice subi par les enfants de harkis du camp de Saint-Maurice. Et réunit pour cela les demandes en justice de réparation : « Nous avons déjà rassemblé 238 plaintes, affirme-t-il. Mon téléphone n’arrête pas de sonner. Je reçois des appels de partout en France… »

Une blessure profonde

Avec, faut-il ajouter, toujours les mêmes indignations partagées. « Nous avons été humiliés et maltraités », résume Rachid, qui a passé toute son adolescence dans cette « petite Algérie grillagée ». Désormais rasé, le terrain de 14 hectares entassait à l’époque les familles sous des tentes et dans des baraquements, avec douches et WC au dehors. « En plus des conditions de vie déplorables et insalubres, tout était surveillé et contrôlé par des militaires », raconte Slimane. Qui devait présenter un bon de transport, délivré par la préfecture, pour pouvoir se présenter à l’extérieur.

Car, au-delà des murs, la France paraît loin de ces harkis qui ont pourtant combattu à ses côtés. « On était dans notre monde, entre nous, mais rejetés et considérés comme des étrangers en dehors. On nous disait : Rentre chez toi ! » Se désole Rachid. Alors, en 1976, à la fermeture du camp, le choc est rude. Sans argent, sans bagage culturel et professionnel pour la plupart, et ne maîtrisant pas bien le français, l’intégration est difficile. « Ce fut comme un deuxième déracinement, après celui de l’Algérie, regrette M. Arfi. Beaucoup d’entre nous ne l’ont pas supporté… »

Pour les autres, cette « blessure profonde » n’a jamais totalement cicatrisé. « J’ai pu m’en sortir, mais ma mère est devenue folle», confie Djamila, qui a passé quatre ans à Saint-Maurice-l’Ardoise. « Je suis fière d’être française et fille de harki mais je ne suis pas fière de ça.» Comme les autres enfants du camp, elle sera représentée devant les tribunaux pour réclamer justice.

10/01/2019

Pour télécharger la Plainte

de Saint-Maurice-L'Ardoise

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