19 Décembre 2012
Le ministre délégué aux Anciens combattants accompagnera François Hollande la semaine prochaine en Algérie, pays où il est né. Pour leJDD.fr, Kader Arif revient sur la relation selon lui, "un peu particulière" qui lie le président à l'Algérie. Ce fils de harki souhaite désormais "passer à une nouvelle étape des relations franco-algériennes et dépasser un passé compliqué, parfois douloureux".
François Hollande se rend en Algérie mercredi et jeudi prochain. Quel est l'objectif de ce voyage?
Celui de réécrire une histoire nouvelle, passer à une nouvelle étape des relations franco-algériennes et dépasser un passé compliqué, parfois douloureux et difficile pour beaucoup de gens. Il faut trouver le chemin d'une mémoire apaisée.
Où en est-on de la relation franco-algérienne?
Dès 2006, le premier secrétaire du PS, François Hollande, avait fait un déplacement en Algérie. Nous y sommes revenus en 2010, il a alors rencontré Monsieur Ben Bella (premier président de l'Algérie indépendante, décédé en avril dernier, Ndlr). C'est une rencontre qui marque. Les contacts entre la France et l'Algérie sont de très bonne qualité.
François Hollande avait aussi été en Algérie en 1978 lorsqu'il était à l'ENA pour y effectuer un stage à l'ambassade d'Alger. Entretient-il une relation particulière avec ce pays?
Je crois savoir qu'il avait beaucoup apprécié ce stage. C'est un pays qu'il aime. A chacun de ses déplacements, on a pu constater qu'il avait une relation un peu particulière, privilégiée. Pas seulement avec les responsables politiques, mais aussi avec la population.
Dans le JDD, en octobre dernier, vous espériez que soit signé à l’occasion de ce voyage un traité d’amitié. A priori, il s'agira plutôt d'une déclaration d’Alger. Le regrettez-vous?
On peut choisir le mot "traité ou "déclaration", ça peut être creux ou plein. L'idée, c'est de construire une relation pleine et entière sur l'ensemble des sujets que nous évoquerons avec nos amis algériens. On s'oriente plutôt vers une déclaration d'amitié.Mais il faut essayer de sortir de l'emprisonnement qui peut être celui d'un cadre formel, qu'on décide à l'avance.
Rejetez-vous, comme Nicolas Sarkozy avant vous, le terme de repentance?
Nous l'avons toujours rejeté. Il ne faut pas rester dans une espèce de relation braquée sur tel ou tel mot. Il n'y a pas de volonté de repentance de la part du gouvernement français. Mais ça n'empêche pas, et ça vaut pour les deux rives de la Méditerranée, de regarder notre passé commun avec lucidité. Il ne s'agit pas de s'auto-flageller mais de regarder les choses positives et négatives qui ont pu s'opérer dans cette relation ancienne et complexe.
Dans le JDD, vous disiez attendre de l’Algérie des gestes. A quoi faisiez-vous allusion?
Je ne veux pas exprimer des choses qui seraient mal perçues par le gouvernement algérien et feraient blocage avant le déplacement de François Hollande. La volonté qui est la nôtre aujourd'hui, c'est de dire qu'on peut discuter.
Avec ce voyage, s’agit-il avant tout d’établir une nouvelle relation?
Oui, il ne faut pas revenir sur le passé. Les questions mémorielles existent, il faudra les traiter. Mais en même temps, il faut voir comment on peut établir avec l'Algérie de nouveaux échanges économiques, travailler dans le domaine de l'Education, de l'Agriculture, des transferts de technologie. Il y a beaucoup de sujets sur lesquels on peut travailler main dans la main, avec la volonté de se traiter d'égal à égal. La vision de la France n'est pas celle de réimposer un point de vue à l'Algérie.
François Hollande s'est engagé "à reconnaître publiquement les responsabilités des gouvernements français dans l’abandon des harkis". Qu'en est-il?
On a reconnu ce qu'a été le sort des harkis. On peut aller plus loin. Mais c'est compliqué de revoir l'Histoire de 1962 en 2012. Il faut faire très attention. Les contradictions sont de différentes natures. On doit avoir un regard qui dépasse sa propre histoire, quelles que soient les douleurs.
Que comptez-vous faire encore sur ce sujet?
La situation des harkis est très compliquée. Il y a une vraie volonté de reconnaissance de ce qu'ils ont été, de ce qu'a été leur engagement auprès des Français. Ils ont beaucoup de difficultés économiques : un taux de chômage élevé, des difficultés d'insertion. Nous sommes en train de discuter avec eux sur plusieurs mesures spécifiques. Et en même temps, je n'ai pas envie d'enfermer les harkis dans une espèce de bulle. Il ne s'agit pas d'en faire des citoyens à l'écart de la communauté nationale.
Vous êtes allés plusieurs fois en Algérie avec François Hollande. Que ressentez-vous lors de ces voyages?
Je suis né à Alger, j'y ai de la famille, ma première langue est l'arabe, mes parents sont Algériens, j'étais issu d'une famille modeste, donc c'est pour moi assez émouvant. Revenir à Alger dans les conditions qui sont celles d'un ministre de la République me procure une espèce de fierté, de joie personnelle, bien sûr. Je pense souvent à la fierté qu'auraient mes parents de me voir là où je suis.
Que répondez-vous à ceux qui vous perçoivent comme étant le ministre des harkis ou le ministre de l’Algérie?
Je ne suis pas un ministre algérien ou le ministre des harkis, je suis un ministre de la République. La confiance que m'accordent Jean-Yves Le Drian (ministre de la Défense, Ndlr), le Premier ministre et le président de la République m'amène à traiter d'autres sujets que la question des anciens combattants. Et en même temps, j'ai envie que ce ministère soit celui du présent mais aussi de l'avenir sur les questions mémorielles.
Votre fonction - ministre délégué aux Anciens combattants - est très politique mais peu exposée. Cela vous convient-il?
Ça ne me dérange pas. Je ne suis pas là pour briller. Je n'ai jamais vécu comme ça. C'est un ministère qui travaille en profondeur, qui est un vrai marqueur dans l'opinion mais n'est pas dans le feu de l'actualité. Je ne le regrette pas.
Article Source : Gaël Vaillant et Caroline Vigoureux - le JDD.fr
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l'Association Départementale Harkis Dordogne Veuves et Orphelins , et le site http://www.harkisdordogne.com/ Périgueux