30 Décembre 2018
Entre tristesse d'un passé douloureux et joie des retrouvailles, l'émotion était palpable, l'autre dimanche au hameau de Timgad.
Une cinquantaine de harkis se sont rassemblés pour raconter leur histoire. Une invitation lancée par l'adjointe Marie-Louise Gourdon, l'historienne Fatima Besnaci Lancou, et le président du Collectif Harkis, Ali Amrane. « Le but est de faire un livre sur les familles qui restera à nos enfants et petits-enfants, expliquait Ali Amrane. On peut raconter ce qu'on a vu, vécu, les conditions de vie, le rapatriement, les parcours, l'intégration, l'engagement… »
« VOUS FAITES TOUS PARTIE DE MA VIE »
Arrivés à Mouans-Sartoux à partir de 1964, 67 familles, première et seconde générations confondues, ont vécu au hameau de forestage de Timgad. « À leur arrivée en France, toute l'Algérie était représentée et redistribuée dans des camps, soulignait Ali Amrane. On retrouve des Kabyles, Berbères, Oranais, Constantinois, Chawis… Ils n'avaient pas la même langue et culture Ils ont dû apprendre à se parler, échanger. »
« Nous avons plus de 50 ans d'histoire commune, soulignait Marie-Louise Gourdon. C'est avec Fatima Besnaci Lancou et son premier livre, Fille de harkis, que j'ai découvert et mieux compris votre histoire. »
« Vous faites tous partie de ma vie, confiait Fatima très émue. J'ai le souvenir des langues et cultures différentes et ça fonctionnait. On a partagé beaucoup de choses »
Mohamed Bessaoud fut le premier à libérer la parole. « Je suis arrivé à 6 ans le 21 juin 1962 à Marseille, se souvint-il avec précision, puis à Bourg-Lastic, Rivesaltes, Carros et Mouans-Sartoux. À 14 ans, je faisais 5 fois le trajet à pied à l'école, 12 kilomètres, deux fois le matin et deux fois l'après-midi puis une 5e fois pour aller chercher le lait. »
Au-delà des conditions matérielles, les blessures de l'âme sont les plus douloureuses. « Les vieux ont souffert, déclarait un ancien. Les pieds noirs qui nous ont encadrés nous ont rendu la vie difficile ».
« Il y avait de la violence dans le hameau, dans les familles et entre harkis, se souvenait Ali Amrane. (...) Il y a eu un traumatisme physique et psychologique. À Biars, Saint-Maurice, Rivesaltes des gens qui essayaient d'éveiller les consciences, étaient internés dans les centres psychiatriques. »
Tour à tour, chacun a raconté les humiliations, la discipline quasi-militaire, le racisme, le couvre-feu à 17 h pour les femmes, la violence, la corruption… Mais aussi la solidarité, les bons souvenirs et la vie, malgré tout. « Je n'oublie pas d'où je viens, témoignait Meriem. Je regarde le résultat d'aujourd'hui et je me dis : on a fait un beau parcours ! »
En 1964, le village qui comptait alors 1 500 habitants a recueilli 500 harkis. De 64 à 86, 65 familles rapatriées ont vécu au hameau de Timgad. Une politique d'intégration volontaire, a permis d'améliorer, dès 1977, les conditions de vie, de travail et de logement des rapatriés.
La ville compte aujourd'hui de nombreux chefs de service harkis. L'ancien camp est devenu un lieu de rassemblement et restera inscrit dans le Plan Local d'urbanisme comme lieu patrimonial de la mémoire des harkis. Le gouvernement a désigné Mouans-Sartoux comme site officiel de la mémoire des harkis le 27 septembre 2001. De nombreuses expositions, débats, rencontres, commémorations et projections sont régulièrement organisés pour transmettre leur histoire.
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