19 Août 2018
Guerre d'Algérie : des mesures pour les harkis bientôt dévoilées
Emmanuel Macron embrasse une femme vêtue d'un bonnet phrygien portant l'inscription Harki, le 8 mai dernier sur les Champs-Elysées à Paris. (Gilles Bassignac/Divergence)
Le quinquennat Macron pourrait être celui de la reconnaissance par le Parlement français du sort des harkis après la guerre d'Algérie. Le chef de l'État doit ouvrir ce dossier éruptif dans les prochaines semaines, alors qu'un rapport remis en juillet à Geneviève Darrieussecq, secrétaire d'État auprès de la ministre des Armées, préconise le vote d'une résolution parlementaire en ce sens. "Je pense que ça peut être un axe intéressant à proposer", avance l'ancienne maire de Mont-de-Marsan, qui soumettra le sujet à la rentrée à Emmanuel Macron et au Premier ministre, Édouard Philippe. "Rien n'est fait, les choses seront décidées en septembre", précise prudemment la secrétaire d'État.
Elle souhaite dévoiler une série d'annonces le 25 septembre, pour la journée nationale d'hommage aux harkis, ces supplétifs algériens de l'armée française pendant le conflit de 1954-1962.
Parmi la cinquantaine de propositions, le rapport recommande de rendre obligatoire l'enseignement de la guerre d'Algérie au collège et au lycée, aujourd'hui optionnel sauf en première générale. Cela "fait partie des moments difficiles de son pays qu'il faut connaître", estime Geneviève Darrieussecq. Qui ajoute : "Ça ne dépend pas que de moi, c'est à travailler avec le ministre de l'Éducation nationale", Jean-Michel Blanquer. Elle doit aussi se pencher sur l'éventuelle création d'un "fonds de réparation et de solidarité" en faveur de cette communauté.
Une résolution parlementaire plutôt qu'une loi
Pour l'heure, elle marche sur des œufs. Parce que les arbitrages n'ont pas encore été rendus, mais aussi parce que le sujet est sensible. La communauté harkie réclame de longue date la reconnaissance de son histoire. Après la signature en 1962 des accords d'Évian qui ont mis fin au conflit, entre 55.000 et 75.000 harkis, selon les historiens, ont été abandonnés de l'autre côté de la Méditerranée, victimes de sanglantes représailles de la part des nationalistes, qui les considéraient comme des traîtres.
Ceux qui ont été rapatriés avec leur famille sur le sol français – 90.000 personnes – ont été accueillis dans des conditions précaires, sans perspective d'intégration. Ces faits, et la responsabilité des gouvernements français, ont déjà été reconnus par les anciens présidents Nicolas Sarkozy et François Hollande.
Au tour d'Emmanuel Macron de s'emparer du sujet. "C'est un dossier qui lui tient à cœur, comme au gouvernement", assure Geneviève Darrieussecq Macron a déjà été confronté à la plaie non cicatrisée de la guerre d'Algérie pendant la campagne présidentielle. En visite à Alger en février 2017, le candidat avait qualifié la colonisation de "crime contre l'humanité", déclenchant une violente polémique. Il s'était attiré les foudres de ses adversaires, dont Gérald Darmanin, à l'époque toujours membre des Républicains, devenu depuis son ministre de l'Action et des Comptes publics. "Honte à Emmanuel Macron qui insulte la France à l'étranger", avait tweeté le petit-fils de harki.
Les auteurs du rapport suggèrent la voie d'une résolution parlementaire – un texte débattu et voté par l'Assemblée et le Sénat, mais qui n'a pas valeur de loi. Les harkis, eux, demandent une "loi de reconnaissance". "Elle nous est refusée pour ne pas envenimer les relations diplomatiques entre l'Algérie et la France", avait accusé en juin l'un des représentants du Comité National de Liaison des Harkis (CNLH) au sein du groupe de travail sur le sujet, Mohamed Badi. "La loi ne saurait […] restreindre la liberté d'expression et de recherche des historiens", plaide le rapport.
Les associations ont aussi critiqué le montant de 40 millions d'euros sur quatre ans que compte proposer Darrieussecq au chef de l'État pour le "fonds de réparation et de solidarité", quand les harkis et leurs descendants réclament entre 4 et 35 milliards d'euros. "C'est un soutien pour ceux qui sont le plus en difficulté, cela peut paraître suffisant", estime la secrétaire d'État, qui se dit toutefois prête à "l'ajuster dans un deuxième temps". Prudence, toujours.
18/08/2018
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