14 Mars 2013
Une nouvelle association est née sur Agen. Objectif : fédérer les Harkis et leurs descendants et rouvrir les portes d’une histoire souvent considérée comme taboue.
Fatima Valla et Djamila Lagarde ont créé l’association Zeitoun, le 7 février dernier. (Photo émilie drouinaud)
«Quand on vous parle des Harkis, qu’est-ce que cela signifie pour vous ? » La question, Fatima Valla et Djamila Lagarde la posent tout de go à la journaliste qui les reçoit. Réponse de l’intéressée un peu floue et pétrie de clichés. Les deux femmes sourient et tirent de cette médiocre prestation de leur hôte, la certitude qu’elles font bien.
Elles ont créé, le 7 février dernier, avec une poignée d’autres enfants de Harkis l’association Zeitoun. Et pour que l’association se fasse connaître, elles organisent, samedi, dans le local de cette dernière, 18 rue Voltaire à Agen, leur première permanence de 14 heures à 16 heures.
Pourquoi cette structure associative alors qu’il en existe d’autres notamment à l’Est du département ? « Justement parce qu’il n’y en a pas dans l’Agenais. C’est à l’issue d’une série de réunions à Bias que nous avons eu l’idée de couvrir cette partie du département avec l’ambition de fédérer non seulement les Harkis de l’Agenais mais leurs descendants, enfants et petits-enfants. Nous souhaitons les informer et aussi les recenser car nous ne savons pas qui ils sont et où ils sont », précise Djamila Lagarde.
Fatima est fille de Harki et a quitté l’Algérie à l’âge de six ans. « Avec mes parents et mon frère, nous avons été aiguillés vers le camp de Bias. Puis mes parents ont décidé d’en sortir pour nous intégrer. Nous sommes partis vivre à Astaffort où nous avons été très bien accueillis, parrainés par des notables de la commune.
L’intégration a été parfaite. Et dans la famille, on n’évoque pas ce passé… » Et Djamila, elle aussi fille de Harki, de renchérir : « Dans la communauté algérienne ou maghrébine, le mot Harki est souvent associé à celui de traître ou de collabo… Les Pieds-Noirs considèrent que nous avons vécu à peu près la même chose mais ils sont aussi persuadés que c’est à cause des Harkis en partie qu’ils ont dû quitter l’Algérie.
Enfin, pour les jeunes de ma génération, ce passé est une partie de l’histoire que l’on ne préfère pas aborder… C’est tabou de remuer ces moments douloureux et chargés d’émotion. »
Face à ces constats, les fondateurs de l’association Zeitoun ont décidé de réagir. « Nous souhaitons que l’association soit ouverte à tous : aux Harkis, à leurs descendants, aux Pieds-Noirs, aux anciens combattants de la FNACA avec lesquels nous sommes déjà en relation et aux citoyens quels qu’ils soient.
Une structure d’information, de ressources, et de partage… » C’est d’ailleurs dans cet esprit que le nom de l’association a été choisi. « Zeitoun signifie olivier, l’arbre chargé de symboles. Symbole de paix et de réconciliation, symbole dans les écritures religieuses de l’annonce de la fin du déluge, symbole de victoire aux Jeux Olympiques, symbole de longévité, témoin de force et de l’histoire », ajoute la jeune vice-présidente.
Samedi, Zeitoun fait sa première permanence et élabore déjà quelques projets. Les 19 et 20 avril, elle inaugurera ses locaux de la rue Voltaire. « Nous avons prévu une exposition, la projection de documentaires sur la colonisation, la guerre d’Algérie, les Pieds-Noirs et ceux qui ont combattu. Il y aura aussi des animations culturelles avec chants et danses. Et puis nous allons éditer le témoignage d’une fille de Harki domiciliée aujourd’hui à Castres. Un témoignage que nous n’excluons pas de mettre en musique pour le théâtre. »
Des projets, Zeitoun en a. Aujourd’hui, cette structure associative montée par une majorité de femmes de différentes générations, veut rassembler « et peut-être initier un pardon ».
Association Zeitoun, 18 rue Voltaire à Agen. Renseignements au 06 70 31 27 90.
Courriel : association.zeitoun@gmail.com
Article Source Sud Ouest : Par valérie deymes
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