18 Juillet 2019
À 51 ans, Mohamed Sanhadji est récompensé pour son parcours professionnel exemplaire.Photo DR
Mohamed Sanhadji a fait une exception pour La Provence. Sans doute, cette fois, la fierté et l'émotion étaient trop grandes pour garder ses sentiments pour lui. Le moment est exceptionnel. Lors de la promotion du 14-Juillet, le Pertuisien a été élevé au grade de Chevalier de la Légion d'honneur. Pour le fils de harki devenu militaire, qui a érigé la République et ses valeurs au-dessus de toute autre considération morale, c'est le sommet. L'aboutissement d'un parcours professionnel, d'un long chemin personnel, d'une vie. Alors, celui qui occupe depuis 2004 le rôle de chef de la sécurité de l'équipe de France de football, a accepté de s'extirper de sa pudeur naturelle pour nous livrer ses impressions, lui qui ne s'exprime jamais dans les médias malgré des dizaines de sollicitations, droit de réserve oblige.
"C'est un honneur et une fierté. Je ressens beaucoup d'émotions, nous a-t-il confié. Faire partie de cette promotion du 14-Juillet c'est un symbole car je suis policier, un serviteur de l'État. Et puis, c'est symbolique aussi pour tous les jeunes du monde rural. La République est une chance pour tous. Avec elle, on peut connaître de belles choses. C'est une réalité. Mon idée était de la servir. Tellement de gens réussissent des choses extraordinaires. J'en suis un modeste exemple..."
Fils de harki, il a grandi dans un camp
Né à Cadenet il y a 51 ans, Mohamed Sanhadji, fils d'Abdallah et Houri, a grandi dans un camp de harkis à Pertuis avec ses onze frères et sœurs. Celui que tous ses amis appellent "Peppone" a voulu dédier sa vie à la France. D'abord gardien de la paix, il est ensuite devenu CRS. En 1999, il fait partie des treize premiers policiers français projetés sur le théâtre de conflit au Kosovo dans le cadre d'une mission des Nations unies durant laquelle il sera blessé.
Quelques années plus tard, capitaine Sanhadji, aux multiples décorations, est choisi pour occuper le poste tant convoité d'officier de sécurité et de liaison auprès de la fédération française de football. Il intègre le staff des Bleus. Trois sélectionneurs (Domenech, Blanc puis Deschamps) lui ont maintenu leur confiance. Le Pertuisien veille sur les joueurs, met au point les déplacements à l'étranger et les camps de base lors des compétitions internationales.
Mohamed Sanhadji (à droite), à côté du président de la FFF, Noël Le Graët. (P.Lahalle/L'Équipe)
Devenu commandant,Mohamed Sanhadji a tout connu avec les Bleus. Du fiasco de Knysna en Afrique du Sud en 2010 au sacre mondial en Russie en 2018 en passant par la dramatique soirée du 13 novembre 2015 lorsque l'équipe nationale jouait au Stade de France pendant les attentats.
D'une discrétion absolue, le Pertuisien sait parfois se muer en confident des jeunes footballeurs qui le respectent. Pour tout ce qu'il a fait et ce qu'il représente, Mohamed Sanhadji a été promu Chevalier de la Légion d'honneur. Lui y voit un message pour les plus jeunes et les défavorisés. "Je viens d'un camp, d'un village..., rappelle-t-il la gorge nouée. Avec de l'abnégation, du respect et du travail, on peut y arriver. Mais ce n'est pas une fin en soi."
"Il doit tout à la France"
Père de deux enfants Enzo (9 ans) et Léo (4 ans), "Peppone" revient dès qu'il le peut à Cadenet où il a fait construire une maison. Il y retrouve ses amis, ses proches et des connaissances. Devenu porte-drapeau de la communauté harki au décès de son père, ancien militaire, Mohamed Sanhadji se fait un devoir de poursuivre son oeuvre. Sans jamais se départir de sa ligne de conduite. N'a-t-il pas refusé de prendre en charge la sécurité personnelle de Zinedine Zidane à Madrid pour rester fidèle à son engagement pour son pays ? "Il répète souvent qu'il doit tout à la France", glisse l'ancien maire de Pertuis André Borel, un personnage central dans le parcours du policier qui a œuvré en tant qu'ancien parlementaire pour que la Légion d'honneur lui soit accrochée au revers de son uniforme.
Pour Mohamed Sanhadji, avec cette distinction, la boucle est bouclée. La reconnaissance de la Nation comme ultime combat d'un homme qui porte en lui un lourd héritage, non pas comme un fardeau mais comme une indéfectible source d'énergie. Les joueurs de l'équipe de France racontent à son sujet qu'il conclut régulièrement ses apparitions par la formule "Au service de la République" ! Rarement, elle aura pris tout son sens comme ce 14-Juillet...
17/07/2019
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- La légion d'honneur, qu’est-ce que c’est ?
en 10 questions -
Question 10, Comment évolue-t-elle ?
La Légion d’honneur vit avec son temps et suit les évolutions de la société. Elle reconnaît de plus en plus la place du monde associatif et salarial, les parcours d’origine modeste et la place des femmes grâce à une stricte parité dans chacune des promotions civiles.
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