22 Octobre 2019
- Cela vous a peut-être échappé -
Préfet Ceaux, Saint-Maurice-l'Ardoise
Le rapport du préfet Ceaux sur les harkis : relevé de quelques erreurs
Général Maurice Faivre
Cet important rapport (200 pages) a été établi par le préfet Ceaux et le Conseiller d’État Chassard, à la demande de la secrétaire d’État aux Anciens combattants.
Je suis sensible au fait qu'il reprend les effectifs historiques que j’ai publiés dans plusieurs ouvrages (1). Sans prendre parti sur les 56 propositions formulées, qui sont de nature politique, j’ai noté un certain nombre d’erreurs historiques :
p. 6. Les directives prescrivaient de laisser les armes enchaînées dans les unités supplétives et régulières. Mais cette mesure n’était pas toujours appliquée. Dans la harka de l’Oued Berd, les harkis allaient en permission avec leur fusil.
p. 9. les effectifs cités par l’historien Charles-Robert Ageron sont souvent faux. Contrairement à son affirmation, les statistiques n’étaient pas trafiquées par le 1er Bureau.
p. 12. Les statuts des différentes catégories de supplétifs sont unifiés en janvier 1959. Le décret du 6 novembre 1961 remplace le recrutement individuel et journalier par des contrats d’engagement renouvelables de 1 à 6 mois.
p. 13. Les fusils de chasse et les lebels ont été transférés des harkas aux Groupes d’autodéfense en septembre 1958. En mars, les harkas sont dotées de fusils-mitrailleur et de fusils de guerre.
Les harkis dites amalgamées ont le même armement que les unités françaises. En 1959, les commandos de chasse reçoivent des fusils automatiques.
p. 17. Challe n’a pas promis de ne pas engager les harkis contre leurs frères musulmans. Il dit l’inverse devant de Gaulle au PC de l’opération Jumelle. Mohamed Harbi, historien du FLN, estime que «les méthodes répressives et les injustice du FLN apparaissent comme les motifs principaux de l’engagement massif des harkis».
Le préfet Ceaux à Saint-Maurice-l'Ardoise (midilibre.fr, 28 avril 2018)
p. 19. Les harkis, en majorité non francophones, ont rarement été engagés dans les DOP.
p. 24. Krim Belkacem n’a pas dirigé la wilaya 3 qui n’existait pas avant le Congrès de la Soummam. Le premier chef a été Mohamedi Said, suivi de Yazourene, d’Amirouche et Mohand Ou el Hadj.
p. 25. Le général Fourquet n’était pas opposé aux mesures de recherche des harkis. En revanche le général de Gaulle a recommandé d’en finir avec les auxiliaires, ce magma qui n’a servi à rien (Comité des Affaires algériennes le 3 avril 1962)
p. 26. Les conclusions de la Commission Massenet ont été refusées par le gouvernement (Joxe) le 19 avril 1962.
p. 29. Tous les camps de transit n’ont pas été créés en juin 1962. Larzac est créé le 26 mai, Bourg-Lastic le 19 juin, Rivesaltes et St Maurice en septembre 1962, Bias en janvier 1963.
p. 36. Les moniteurs des camps de transit et hameaux forestiers n’étaitent pas hostiles à la population des camps. La plupart étaient d’un grand dévouement. Voir thèses de Anne Einis, Hamoumou et J. Servier, rapports Leveau-Meliani, Rossignol, Yvan Duran, témoignages des EMSI, Denise Bourgois, André Wormser, Père Merlet.
p. 39. Les centres de transit n’étaient ni des prisons ni des camps Med. Le confort était sans doute insuffisant, mais la formation professionnelle, ménagère et scolaire était pratiquée, y compris à Bias (voir photos).
p. 44. L’accès à la propriété a été favorisée par les préfets et les assistantes sociales.
p. 45. La population rapatriée de 1ère génération comptait 66.000 personnes, dont 21.000 hommes.
Rivesaltes, photo : Général Maurice Faivre
Maurice Faivre, Bias
(1) - Il ignore cependant les précisions apportées par Les archives inédites de la politique algérienne, 1958-1962 (Maurice Faivre, L'Harmattan, 2000), L’action sociale de l’armée en faveur des musulmans (Maurice Faivre, L'Harmattan, 2007), La croix Rouge en guerre d’Algérie (Maurice Faivre, Lavauzelle, 2007), les articles de Hamoumou et de Jean-Jacques Jordi sur l’intégration.
Certains historiens cités développent une idéologie antimilitariste ou anticolonialiste (Manceron, Vittori, D. Kerchouche, Boussad Azni). Charles-Robert Ageron dévalorise le combat des harkis et estime que de Gaulle a tout fait pour les rapatrier.
Cliquez sur le rapport
Rapport harkis, préfet Ceaux, juillet 2018
Voici un extrait de l’histoire des harkis (Maurice Faivre, 2001)
Alors que GMS et Moghaznis étaient engagés sous contrat de 6 mois, les harkis avaient jusqu'en 1961 un statut de journaliers, bien qu'ils restent en service plusieurs mois, et qu'ils soient payés mensuellement (22.500 AF). Environ 3.000 d'entre eux étaient des rebelles ralliés.
Les harkas amalgamées avaient le même armement que les unités régulières. Quant aux autodéfenses, elles étaient armées à 50% de fusils de chasse et de 8 mm, et en principe n'étaient pas rémunérées (MAA 340, 1H 2028, 2029).
S'étant engagés davantage pour la défense de leurs familles que pour la solde, les supplétifs étaient opposés à la conception totalitaire du parti unique du FLN. Ils faisaient confiance à l'armée pour faire évoluer l'Algérie dans un sens démocratique et égalitaire. Le rappel de Challe en mars 1960 ne permet pas de mener à bien son projet de Fédération des UT et des autodéfenses, qui aurait constitué un parti français opposé au FLN (7T 249).
Crépin, le successeur de Challe, avait promis en janvier 1961 que les harkis, considérés comme vainqueurs, auraient la première place dans l'Algérie future, et qu'ils resteraient groupés et armés pendant un an après le cessez-le-feu (1H 1096/1). Mais dès l'été 1961, le gouvernement décide d'amorcer la réduction des effectifs des harkas et des autodéfenses, et de «civiliser» les SAS, ce qui reviendrait à supprimer les maghzens, alors que Challe leur avait confié la responsabilité opérationnelle des Quartiers de pacification (1H 1304, 2027, 2028, 2556).
Extrait de "L'histoire des harkis",
revue Guerres mondiales et conflits contemporains, 2001,
n° 202-203, p. 55-63.
Général Maurice Faivre
08/10/2018
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