1 Octobre 2019
Mercredi 25 septembre, Mohand Hamoumou, maire de Volvic, participera à la Journée nationale d'hommage aux harkis. / © Catherine Lopes / France 3 Auvergne
Le mercredi 25 septembre est la Journée nationale d’hommage aux harkis. A cette occasion, Mohand Hamoumou, docteur en sociologie et maire de Volvic, dans le Puy-de-Dôme, revient sur la nécessité du devoir de mémoire.
Depuis 2003, la Journée nationale d’hommage aux harkis se tient le 25 septembre. Cinquante-sept ans après la fin de la guerre d’Algérie, leur sort reste encore une plaie à vif. Mohand Hamoumou, docteur en sociologie, professeur à Grenoble Ecole de Management et maire de Volvic, dans le Puy-de-Dôme, a écrit plusieurs ouvrages à ce sujet. Il a ainsi fondé l’association AJIR, Association Justice, Information, Réparation. Il souligne l’importance de la notion de reconnaissance et cite Dominique Schnapper, qui a préfacé l'un de ses ouvrages : « L’épisode des harkis constitue une page honteuse de l’histoire de France, comme le statut des juifs ou la rafle du Vél d’Hiv".
Par harkis, le sociologue désigne les anciens harkis, intégrés dans les unités militaires, précieux pour leur connaissance du terrain, mais aussi les anciens notables (caids, bachaghas,) qui servaient l’administration française, les administratifs menacés par le FLN et les militaires de carrière. Ce sont là « tous les gens de souche arabo-berbère menacés par le FLN pour leur engagement avec ou pour la France. Il faut savoir aussi que la population était prise en étau, avec d’un côté la violence terroriste du FLN, et de l’autre la guerre subversive menée par l’armée française. Pris entre deux feux, certains sont devenus harkis pour protéger leur famille » explique Mohand Hamoumou. "Les « harkis » regroupent donc une population hétérogène. C’est l’histoire qui en fait une communauté de destin ".
" On a laissé des gens se faire massacrer "
Il ajoute « Quelles que soient les raisons, ils ont rempli leur part du contrat, de défendre la population, de servir l’armée française. Le nœud du problème est que l’Etat n’a pas rempli sa part du contrat. Les Accords d’Evian prévoyaient que personne ne serait inquiété, que les biens et les personnes seraient protégés. L’armée présente jusqu’en 1964 n’a pas fait respecter les accords d’Evian. On a laissé des gens se faire massacrer. Le rapatriement des anciens harkis n’était ni prévu, ni voulu. Cet abandon a longtemps été caché ».
Le maire de Volvic rappelle qu’il a fallu attendre *Jacques Chirac pour qu’un président français reconnaisse que « La France n’a pas su sauver ses enfants ». Depuis, chaque président a apporté sa pierre au travail de vérité. Ainsi, Nicolas Sarkozy a reconnu la responsabilité du gouvernement français dans l’abandon d’une partie des harkis et François Hollande a admis la responsabilité du gouvernement français.
"Poursuivre le travail de reconnaissance et de réparation"
Cette communauté attend désormais des décisions fortes de la part du président Emmanuel Macron, qui, en tant que candidat a dit qu’il ouvrirait le dossier. Le maire de Volvic rappelle que "Geneviève Darrieussecq, Secrétaire d’Etat auprès de la ministre des Armées, a dit dans son discours du 25 septembre 2019 que le président entend poursuivre le travail de reconnaissance et de réparation ». Mohand Hamoumou souligne que la reconnaissance et la réparation sont essentielles.
Il rappelle : « Par reconnaissance, il faut témoigner de la gratitude à l'égard des gens qui ont pris des risques, qui ont souvent payé de leur vie ou qui ont été parqués dans des camps. Il faut une reconnaissance des fautes commises et ensuite passer à la réparation, et donc préalablement évaluer les préjudices subis ». Pour le sociologue, la réparation est une question délicate. Il indique : « Il y a des choses qui ne se réparent pas, comme la perte d’un enfant mort de froid, il y en a eu 11 à Bourg Lastic, comme les massacres en Algérie, comme les vies gâchées parce qu’on a été enfermé 13 ans dans un camp. Le processus de réparation doit commencer par l’évaluation des préjudices subis, matériels et moraux. Il faut mettre en place une commission d’évaluation avec des hauts magistrats, des assureurs. La réparation est aussi symbolique ».
8 propositions remises à l'Elysée
A l’occasion du Grand débat national, Mohand Hamoumou a remis à un conseiller du président de la République 8 propositions retenues à l’unanimité lors d’une réunion. La première d’entre elle appelle au vote d’une loi mémorielle reconnaissant officiellement l’abandon des harkis désarmés après le 19 mars 1962 et le traitement indigne infligé à ceux qui purent se réfugier en métropole. Le maire de Volvic attend une prise en compte de ces demandes. Il conclut : « Emmanuel Macron agira. Il le fera car c’est quelqu’un de courageux. Il faut du courage pour reconnaître les torts de l’Etat et essayer de réparer ».
25/09/2019
*Journée d'hommage aux harkis
Saint-Pons-de-Thomières (Hérault) - Stèle des Harkis
Le 25 septembre 2001, une journée d'hommage unique reconnaît officiellement le drame des harkis. Le président de la République, Jacques Chirac, inaugure une plaque, dans la cour d'honneur de l'Hôtel des Invalides, reprenant l'article premier de la loi du 11 juin 1994. Dans vingt-sept sites de France, les préfets posent la même plaque, tandis que dans tous les départements, une cérémonie est organisée en l'honneur des harkis. Chirac affirme :
« Notre premier devoir, c’est la vérité. Les anciens des forces supplétives, les Harkis et leurs familles, ont été les victimes d’une terrible tragédie. Les massacres commis en 1962, frappant les militaires comme les civils, les femmes comme les enfants, laisseront pour toujours l’empreinte irréparable de la barbarie. Ils doivent être reconnus. La France, en quittant le sol algérien, n’a pas su les empêcher. Elle n’a pas su sauver ses enfants. Les Harkis ne sauraient demeurer les oubliés d’une histoire enfouie. Ils doivent désormais prendre toute leur place dans notre mémoire. La mission des historiens doit se poursuivre. Elle doit être menée avec conscience et impartialité. La connaissance du passé, parce qu’elle permet de rendre justice aux victimes de l’histoire ne peut que servir l’approfondissement de notre concorde nationale. Ce devoir de vérité trouve son prolongement naturel dans un devoir de reconnaissance. »
Le 31 mars 2003, le Président de la République, Jacques Chirac instaure une « Journée nationale d'hommage aux Harkis et aux autres membres des formations supplétives des armées françaises », le 25 septembre de chaque année. Hamlaoui Mekachera, secrétaire d'Etat aux anciens combattants, commente : « Pour leur courage et leur fidélité à la France, tous [les combattants musulmans] méritent la reconnaissance de la République. C’est pourquoi le président de la République a décidé de pérenniser et d’inscrire dans le calendrier officiel des commémorations nationales la Journée d’hommage aux harkis qu’il a présidée pour la première fois en 2001 et qui avait été reconduite l’année dernière. Plus qu’une simple officialisation, le décret du 31 mars 2003, qui instaure une Journée nationale d’hommage aux harkis et autres membres des formations supplétives, est la marque forte et tangible de la gratitude des autorités de l’État et de la Nation tout entière, envers ces hommes et ces familles qui ont payé d’un prix souvent terrible leur attachement à la France. »
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